Projet global sur la détention: cartographie de l'évolution de la détention de migrants à l'ère de la mondialisation
Description
Le but de ce projet soutenu par le Réseau universitaire international de Genève (RUIG) est une recherche sur les conditions et les facteurs qui contribuent à la détention de migrants internationaux "irréguliers". Les déplacements transnationaux de population sont l’un des phénomènes caractéristiques du XXIème siècle, et son acuité a été soulignée dans le rapport final de la Commission mondiale de l’ONU sur les migrations internationales, publié en octobre 2005. Selon ce rapport, le nombre de migrants internationaux a plus que doublé dans les trente dernières années, atteignant environ 200 millions, – soit environ une personne sur 35 sur notre planète. Un fort pourcentage d’entre eux sont des "migrants en situation irrégulière", qui traversent les frontières sans papiers ni visas valables. D’après la Commission, ces chiffres vont augmenter inexorablement, étant donné les effets de la globalisation et les disparités croissantes de développement entre les pays riches et les pays pauvres.
Avec tout un cortège d’autres phénomènes transnationaux, la migration oblige à voir au-delà des frontières nationales pour chercher des solutions globales à la mesure de l’ampleur des difficultés. Néanmoins, il semble que l’augmentation de la coopération internationale en matière de migrations ait coïncidé avec une réduction des garanties légales accordées aux migrants dans les pays hôtes. On constate que la coopération a conduit de plus en plus d’Etats, notamment ceux qui bordent la partie "nord" du globe, à adopter des contrôles plus stricts pour endiguer le mouvement migratoire. Une forme de ces contrôles est l’utilisation accrue de centres de détention et de camps d’internement pour gérer les migrations. De la Grande-Bretagne à l’Ukraine, des Etats-Unis au Guatemala, de l’Australie à la Malaisie, la détention semble être devenue la norme pour faire face aux migrations hors-la-loi.
Malgré ces tendances, aucune étude systématique n’a encore tenté d’évaluer le rôle que joue la détention dans la gestion des migrations. Personne non plus n’a encore évalué de manière approfondie les motifs qui ont poussé des pays à renforcer la détention, les recoupements, dans ce domaine, entre des politiques de pays différents, ou encore dans quelle mesure ces efforts de gestion ont fait perdre à des pays un certain souci des droits de la personne humaine.
Le projet "Détention globale" traitera de ces questions. Il aura deux objectifs principaux: 1) examiner si, et dans quelle mesure, des Etats ont renforcé leurs activités de détention ces dernières années, et quels revirements cela a pu provoquer dans leurs engagements pour des normes internationales; et 2) chercher à comprendre les différents facteurs qui poussent des pays à choisir la détention pour réagir aux migrations, et analyser le pourquoi de certaines politiques de détention particulières. L’équipe du projet emploiera deux moyens pour poursuivre ces buts: d’abord, elle établira un relevé des centres de détention de migrants dans plusieurs points chauds du globe – en particulier dans des pays dits "de transit" – pour déterminer les caractéristiques de quantité et de diversité des pratiques de détention; et deuxièmement, elle entreprendra une analyse comparative des différents facteurs qui ont déterminé les pays à opter pour telle ou telle politique de détention en particulier.
La partie "relevé" du projet comprendra l’élaboration d'une base de données d’informations sur les emplacements d'établissements de détention de migrants, sur les types d’établissement utilisés (centres d’admission ou d’expulsion, prisons ordinaires, camps inofficiels ou temporaires), sur la démographie des détenus et les motifs de détention dont il est fait état, sur le nombre de personnes que peut contenir chaque centre, les conditions de vie qui y règnent, les dirigeants de ces établissements et le statut administratif des détenus. Cela permettra d’élaborer une classification des différents types de centres de détention, classification qui pourra être reprise dans le volet comparatif du projet. Bien que les chercheurs aient l’intention d’utiliser les données du relevé à des fins cartographiques et pour une triangulation avec le volet comparatif, on prévoit également de rendre ces données accessibles à une plus vaste échelle. Les sources de cette base de données comprendront des autorités d’immigration nationales et des rapports d’OI et d’ONG.
Le volet comparatif du projet sera axé sur les deux groupes de variables dont on pense qu’ils déterminent des types différents de politiques de détention: 1) facteurs motivationnels, c’est-à-dire les types de craintes (par exemple d'être submergé par des migrants) et d’objectifs (par exemple décourager les migrants à l’avenir) qui conduisent à certaines pratiques de détention spécifiques; et 2) facteurs structurels (par exemple: restrictions budgétaires, mandats d’organisations, relations avec des pays de destination dans le passé) qui déterminent quels types de politiques sont les plus praticables dans des pays donnés. Ces facteurs structurels et motivationnels constitutifs de différents types de détention peuvent ensuite s’inscrire dans divers processus de propagation, soit par collaboration officielle entre Etats, soit par simple tentative d’imiter ou d’apprendre. Cette étude comparative tirera ses données d’entretiens avec des fonctionnaires ainsi que de divers rapports.
La contribution du RUIG pour ce projet s'élève à CHF 200'000
Equipe de recherche
Prof. David Sylvan , Coordinateur, Section sciences politiques , Institut universitaire de hautes études internationales (IUHEI) .
M. Michael Flynn , Co-coordinateur, Section sciences politiques , Institut universitaire de hautes études internationales (IUHEI) .
Mme Beate Andrees , Membre principal, Programme d'action spécial pour combattre le travail forcé (SAP-FL) , Programme focal pour la promotion de la Déclaration (DECLARATION) , Secteur des normes et des principes et droits fondamentaux au travail (STANDARDS) , Bureau international du travail (BIT) .
Prof. Vincent Chetail , Membre principal, Centre universitaire de droit international humanitaire (CUDIH) , Université de Genève (Unige) .
Prof. Andrew Clapham , Membre principal, Section droit international , Institut universitaire de hautes études internationales (IUHEI) .
Dr. Jeffery Crisp , Membre principal, Évaluation et analyse des politiques , Recherche et évaluation , Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) .
Mme Anna Gallagher , Membre principal, International Detention Coalition .
Mme Mariette Grange , Membre principal, Conseil international pour l’étude des droits humains .
Dr. Charles Harns , Membre principal, Organisation internationale pour les migrations (OIM) .
Mme Navitri Putri , Membre principal, Section sciences politiques , Institut universitaire de hautes études internationales (IUHEI) .
M. Christoph Bierwirth , Ancien membre, Département de la protection internationale (DPI) , Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) .
Liens
Actualité(s) liée(s)
-
Le RUIG approuve onze projets de recherche – 19.09.06
Le Réseau universitaire international de Genève (RUIG) a adopté, dans le cadre de son sixième appel d'offres annuel,...
> suite